Trouvée

Publié le 27/04/2011 à 22:48 par histoires-dune-brune Tags : homme fille bonne ange oiseau lecture pensées prénom hiver neige voiture horreur
Trouvée

Bon, je crois que j'aime bien le thème de la fille mystérieuse aperçue dans la rue ^-^" C'est donc un peu le thème de l'ange que j'avais repris ici, et je dis bien "avais" parce que ce petit début n'est qu'une esquisse que je n'ai pas poursuivie. Pourtant, ça m'avait l'air intéressant... :P Une petite précision rapport au point de vue, au début c'est celui du garçon, puis celui de la fille, donc un narrateur interne, mais au troisième paragraphe je suis passée à un narrateur omniscient. Voilà, bonne lecture !

 

 

Je marchais vite, pressé par la froideur ambiante. Quel hiver ! On n’avait jamais vu de telles températures, et je comprenais vraiment le bulletin météo de ce matin à cet instant précis… Frissonnant, maugréant, je trottinais sans regarder où j’allais, connaissant le chemin par cœur. La maison n’était pas loin du lycée, à peine quinze minutes de marche, mais la neige donnait l’impression d’un trajet à travers l’Alaska durant trois jours… En exagérant peut-être légèrement.

Tout à mes pensées, je ne remarqua pas tout de suite l’amas de linge sale sur le trottoir. Ou plutôt, je pris le tas pour un pauvre homme sans logement. Mais lorsque le tas se jeta sur moi et me jeta un regard glacial, je sus que j’étais loin de mon idée première.

C’était une fille, une magnifique petite personne, qui était en train de me faire sentir tous les os de mon poignet à le comprimer si vigoureusement. Farouche, désespérée, elle me fixa durement, comme si elle cherchait à savoir si je pouvais lui faire du mal ou pas. Surpris, je me laissa emporter par son regard émeraude… Je ne voyais en réalité plus que ses yeux. Ayant une brusque envie de la rassurer, je lui souris d’un air doux. Elle fit un bond en arrière, bougea la tête comme un oiseau, sur le côté, me jaugea encore… Et son expression se transforma radicalement : le petit oiseau au regard farouche et inquiet devint un visage mature, triste, infiniment triste, déformé par la peur, par l’inquiétude, par les larmes qui coulaient maintenant sur son visage légèrement tâché de sang. Je fus complètement déboussolé l’espace d’un instant ; elle avait changé de visage, je n’avais pas rêvé ! Enfin, elle faisait moins enfantine, sa peau avec des traces de boue et ses cernes montrait qu’elle avait sûrement passée quelques nuits dehors… On aurait dit qu’elle venait d’enlever un masque. Mais son regard, ses yeux, ses joyaux, ses émeraudes, eux, n’avaient pas changé. Malgré sa tristesse, elle parut soulagée. Et elle s’effondra sur moi, évanouie. Je resta sans bouger, une minute, cinq, dix, peut-être plus, jusqu’à ce qu’une voiture bruyante passe, accompagnée de son lot de sifflements enjoués pour… Je me rendis enfin compte que je tenais une fille évanouie dans mes bras, ce que les jeunes de la voiture avaient pris pour un petit moment d’intimité. Malgré moi, je rougis à cette idée mais la situation actuelle me fit vite revenir dans l’instant présent. Elle paraissait si paisible, une fois endormie… Je ne pouvais pas la laisser comme ça. Avec mille précautions, je la pris doucement dans mes bras et une fois bien calée je repris mon chemin. Elle devait mourir de froid dans ses maigres vêtements alors que moi-même je ne sentais plus mes mains ! D’ailleurs, elle tremblait et ses lèvres étaient bleues. Il fallait que je me dépêche de rentrer…

Lorsque j’aperçus mon portail, une vague de soulagement m’envahit. Enfin ! Jamais le trajet ne m’avait paru si long. Je savais que la maison était vide, mes parents travaillant loin et tard à l’usine pharmaceutique. Barbouillant le sol au passage, je traversa l’entrée pour vite déposer mon petit paquet sur le canapé du salon. Une fois posée, je cala sa tête avec des coussins et courus chercher une couverture, balançant mes chaussures au passage dans l’entrée. Fébrile, je revins dans la pièce avec un duvet ouvert, bien chaud. Mais le plus difficile était encore à faire, car je devais la déshabiller… En effet, ses habits étaient trempés et la faisaient grelotter.

Ne pensant pas à ce que j’étais en train de faire, m’efforçant de me concentrer uniquement sur l’aspect « santé », je lui retira rapidement sa cape déchirée, découvrant dessous un vieux pantalon, muni d’une simple corde comme ceinture, et une espèce de débardeur. Etonnant qu’avec cette maigre tenue elle ne soit pas morte d’hypothermie depuis longtemps ! Cette constatation navrante pour elle me redonna de la vigueur et j’évita superbement de poser les yeux sur son corps maintenant nu et… Magnifique. Non, je ne devais pas regarder ! Rouge de honte, je tourna la tête et pris le duvet pour le mettre sur elle avant de le refermer autour de son corps gelé pour lui confectionner un petit cocon qui la réchaufferait en moins de deux… En théorie. Le duvet installé, je resta un instant immobile, ne sachant que faire ensuite. Un feu ! On avait une cheminée, autant en profiter. Toujours sur le même rythme, j’attrapa une bûche, un journal et des brindilles pour le faire démarrer et, après quelques instants d’incertitude, les braises se firent enfin sous la bûche. Les flammes s’élevaient, diffusant une chaleur réconfortante. Enfin rassuré, je retourna aux côtés de l’inconnue. Je pouvais enfin la détailler…

Assis en tailleur à côté du canapé, je la contemplais. Sa peau était légèrement basanée, ses cheveux noirs d’une longueur impressionnante pour quelqu’un de son âge, son visage et ses traits d’une finesse remarquable… Je me rappelais de son regard émeraude. Elle était vraiment belle… Cela en devenait presque irréel, son physique faisait… Mystique… ? Une vraie déesse miniature. Comment était-elle arrivée ici ? D’où venait-elle ? Qu’avait-t-elle donc vécue pour avoir une telle expression… ? C’était ce dernier point qui me tracassait le plus. La chaleur du feu, la faible lumière, et surtout les derniers événements fatigants me plongèrent peu à peu dans un coton douillet, jusqu’à ce que je m’endorme, la tête posée sur la canapé, à côté de son visage…

 

***

 

Je me sentais si bien… Il faisait chaud… C’était douillet… Depuis combien de temps n’avais-je pas dormi aussi confortablement… ? Lentement, j’ouvris les yeux. Et soudain, je réalisa que je ne savais pas où je me trouvais. Affolée, je me releva d’un coup. Où était-il ? Où était mon frère ? C’est alors que je sentis l’air frais sur ma peau… nue. Complètement perdue, je pensa enfin à regarder calmement autour de moi. Apparemment, je n’étais pas dans une cave ou emprisonnée je ne sais où. Il régnait dans la pièce une atmosphère plutôt… Rassurante. Ou en tout cas, agréable, pour l’instant tout du moins. Je sentis quelque chose m’effleurer la cuisse… Des cheveux ? Je remarqua brusquement que je n’étais pas seule. Un garçon, qui semblait endormi, venait de bouger dans son sommeil en me balayant la cuisse de sa tignasse mordorée. Silencieuse, j’entrepris de me démêler de la couverture pour me lever sans réveiller la tignasse. Il fallait que je reparte vite, si je ne voulais pas qu’ils me retrouvent. Mais lorsque je m’appuya sur ma main pour me dégager, Tignasse bougea, relevant la tête les yeux fermés, prit ma main et se l’appropria en guise d’oreiller. Il ne manquait plus que ça ! Je fus alors prise d’un vertige, mon bras sur lequel je m’appuyais fléchit et je retomba sur les coussins. J’étais plus affaiblie que ce que je croyais… La faim me tordait le ventre, me donnant envie de vomir. Je toussa violemment, retirant par réflexe ma main, ce qui ne manqua pas de réveiller Tignasse.

Encore somnolant, il cligna des yeux, me regarda, sans comprendre ce qu’il voyait. Jusqu’à ce que ces yeux s’écarquillent. Il devint également rouge pivoine… Avec horreur, je m’aperçus que j’étais toujours nue. Je sentis mes joues chauffer et arracha la couverture pour me cacher. Mais ce maigre effort me fit de nouveau tousser.

 

 

***

 

- Hé, ça va ?

- Ne me touche pas ! Hurla-t-elle.

De la pure terreur se lisait dans ses yeux. Haruo [son prénom à lui], peiné, recula sa main. Que lui avait-on fait… ? Elle toussa encore, crachant du sang, cette fois-ci. S’inquiétant vraiment, il demanda :

- Tu es sûre que tu ne veux rien… ?

Hésitante, elle l’observa. Elle lisait sur son visage un sentiment sincère… Pouvait-elle lui faire confiance… ? Des souvenirs remontèrent, des souvenirs macabres, dus à une confiance placée en de mauvaises personnes… Voulant effacer ces images, sans jamais y parvenir, elle secoua la tête. Haruo, calme, l’observait. Elle paraissait vraiment brisée. Il ne voulait pas la brusquer et n’insista donc pas davantage.